mardi 20 janvier 2015

Bref, je suis devenu un Trailer ...

11 jours après avoir fumé ma dernière cigarette, j'ai pris le départ de mon premier Trail officiel : le Trail des coteaux de Bellevue,  entre Saint-Loup Camas et Pechbonieu.

Récit glissant...



Depuis le réveillon et la réalisation de ma résolution numéro 1 à savoir l'arrêt de la cigarette, je suis pris d'une hyperactivité que je compense (en plus de la vapette qui est devenue ma meilleur amie dans ma lutte contre mes poumons enfumés...et ça marche très bien) par un volume toujours croissant d'activité physique.
Comme 2015 sera l'année du trail avec en point d'orgue la course du Canigou en août, j'ai décidé dimanche dernier de m'inscrire au Trail des Coteaux de Bellevue en version longue (21Km contre 12 Km pour la version courte) à quelques kilomètres de chez moi.

Avec une raclette chez des amis la veille comme seule préparation "spécifique" (et quand même un niveau respectable d'endurance de fond et quelques fractionnés en côte pendant les vacances de Noël, bref je ne partais pas de zéro), j'ai donc pris le départ de cette course ce matin à 9h30.

Le retrait du dossard hier après-midi m'a rapidement mis dans l'ambiance Trail. La charmante dame qui m'a remis mon dossard a bien pris soin de me montrer une petite étiquette agrafée sur le coin du dossard et qui était un coupon pour une bière offerte à l'arrivée ! C'est plus..."festif" que le Marathon comme milieu apparemment.

La météo prévue s'est malheureusement confirmée. J'arrive à Pechbonieu (le lieu de l'arrivée ; le départ a lieu à Saint-Loup Cammas (SLC) à 1,5km de là) vers 8h et il pleut des cordes avec du vent.
Je termine mes préparatifs au chaud dans la voiture et décide de sortir le nez dehors vers 9h pour rejoindre la ligne d'arrivée.
La navette n'est pas là et plutôt que d'attendre immobile dans le froid la fourgonette 9 places qui fait des aller/retours entre les deux villages, j'emboîte le pas d'un couple de concurrents qui vient de décider de rejoindre SLC en footing. 1,5Km à la cool, c'est parfait pour s'échauffer et vérifier une dernière fois mon nouvel attirail trail (hydro bag et guêtres). C'est d'ailleurs ce que font la majorité des concurrents.
Nous voila donc tous arrivés devant la mairie de SLC, derrière l'arche, sous la pluie.

Un organisateur demande une minute de silence à la mémoire de nos chers disparus de la semaine, le peloton des trailers Charlie baisse la tête et se tait.

L'organisateur rompt le silence. S'ensuit des applaudissements fraternels nourris qui annoncent le départ imminent...Avant de lâcher la meute il plaisante sur le terrain "encore plus glissant" que l'an dernier. Des habitués rient jaune derrière moi. J'aurais du me méfier...

3ème à droite casquette blanche
Allez c'est parti pour 1,5Km  de bitume (il n'y en aura pas beaucoup d'autres...) pour sortir du village. Le peloton est beaucoup trop lent à mon goût (10km/h), je me faufile pour suivre le groupe de tête et parcourir ce qui sera la partie la plus facile du tracé (un long faux plat descendant) à plus de 14,5km/h. Autant gagner du temps facilement quand c'est possible.

Au bout du faux-plat, un Gentil Organisateur nous dévie sur un chemin de randonnée. Le sol est gorgée d'eau mais l'herbe permet quand même d'accrocher la foulée.
Les choses se corsent en entrant dans la forêt. L'herbe a disparu et a laissé la place à une bonne grosse gadoue argileuse gorgée d'eau extrêmement glissante dans laquelle on s'enfonce jusqu'à presque la maléole...Ce que je ne sais pas à ce moment là c'est que cet enfer de boue va durer près de 18Km jusqu'au retour sur le bitume à 2Km de l'arrivée.
La difficulté du jour n'est ni la distance ni le dénivelé, c'est ce véritable bourbier parfaitement instable !


Moi le Marathonien qui a tant travaillé les moindres détails techniques de ma foulée de la pose du pied jusqu'à l'alignement des épaules pour la rendre la plus efficace et économique possible, me voila en équilibre instable à chaque pas, les bras écartés pour essayer de rester debout !

 Les Km s'enchaînent. Les obstacles et les solutions pour les franchir sont très varièes : la descente aussi abrupte que glissante qui tourne à la piste noire en ski, la rivière qu'il faut sauter, le raidillon boueux qu'il faut gravir à quatres pattes, les troncs en travers du chemin qu'il faut enjamber...La vidéo à la fin de ce post vous donnera un bon aperçu du programme.
L'ambiance dans le peloton est beaucoup plus conviviale également : j'attrape la main d'un concurrent derrière moi pour l'aider à franchir une bosse glissante que j'ai moi même eu toute les peines du monde à escalader pitoyablement à quatre pattes ; un autre derrière moi me sauvera d'une glissade fatale en me rattrapant par le dos.

Ce 21Km que j'imaginais en gentille balade en forêt va s'avérer être à la hauteur de ce que j'en avais entendu dire : un vrai trail sur un parcours très technique.

Au 10ème Km, mon état de fatigue est proche de celui ressenti à la moitié d'un Marathon. Je pense à me ravitailler avec un gel Isostar et une pastille de sels minéraux du même fournisseur. Mon hydrobag est rempli de boisson isotonique GU citron.

Au Km 12, les parcours du 12Km et du  21Km  se rejoignent, le traffic se fait plus dense et le chemin plus étroit et en devers.

Soudain je sens mon pied droit se dérober vers la gauche, je le vois passer au dela de mon genou gauche, la chute est inévitable. Je tombe au ralentit sur le coté droit, le temps semble s'arrêter tout à coup. Je reconnais trop bien cette sensation très symptomatique du shoot d'adrénaline avec lequel notre corps nous protège d'une grande peur ou d'une douleur violente.

Dans ce cas précis c'est pour ces deux raisons. Je sens immédiatement une violente douleur sur la face interne du mollet droit à tel point que j'imagine tout de suite une grosse déchirure voire une rupture.

J'essaie de me relever. Les crampes s'en mêlent. J'ai les deux mollets et tibias complètement tétanisés et les muscles et tendons se tordent convulsivement.
Je m'étire tant bien que mal en entendant les concurrents me doubler derrière moi. Mon classement va en prendre un coup, il ne faut pas s'attarder et recommencer à courir pour être fixé immédiatement sur la gravité de la blessure.Soit ça va repartir soit ça sera le retour sponsorisé par le SAMU...A ce moment là mon pronostic est à 50/50...

Un pas, un deuxième, un troisième, ça tient. Je reprends un peu mes esprits et recommence à penser à courir.

Je diagnostique une déchirure sur la face interne du mollet déjà fragilisé par une petite contracture de la semaine dernière.

Grâce à la  double épaisseur de contention de mes Booster et du collant, ça devrait pouvoir tenir. Les crampes elles sont toujours là. Arrivées beaucoup plus tôt qu'au Marathon (où elle ne se montrent pas avant le 28ème Km), elles sont bien reveillés par les efforts supplémentaires que demandent ce trail : arracher le pied de la boue à chaque foulée, lever les pieds plus haut pour éviter les obstacles, avaler les côtes glissantes à quatre pattes, gainer les chevilles pour assurer la pose du pied sans glisser sur les devers, ...

Il me reste 9Km de ces réjouissances à parcourir dans cet état. Je suis dans le mur. Que faire?

Rester calme et courir. C'est tout ce que les finishers savent faire dans ces moments là. Je relâche mes épaules, je marche un peu, je bois.
Le soleil se lève enfin, la forêt est superbe. J'ai de la chance d'être là. Cette épreuve est vraiment une course de qualité, relevée, à des années lumières de la balade en forêt que j'imaginais. Je commence à la respecter, à l'apprécier, à l’apprivoiser. Il faut la terminer.
Photo
Je ne suis pas sur cette photo, c'est juste pour vous donner une idée du parcours et de la grâce de la foulée d'un Trailer

Les kilomètres défilent lentement. Chacun est un combat primitif. Je suis devenu un Troll. Je commence à nouveau à doubler des concurrents. Ca va mieux. Je commence à entrevoir l'arrivée.
Au dernier ravitaillement un GO me dit "allez plus que 5Km"...Je suppose qu'il a voulu me remonter le moral et je le remercie d'un signe du pouce...
Encore 5 Km ! Ma déchirure hurle dans chaque montée et à chaque fois que je dois lutter pour éviter que mon pied ne reparte en glissade sur un dévers...et il n'y a que ça sur les 3Km suivants...Rester calme et courir encore. Ignorer cette douleur. Penser à la bière fraîche à l'arrivée (j'en profite pour vérifier que mon coupon est toujours bien agrafé à mon dossard).

A la sortie d'une énième clairière, j'aperçois un lotissement puis le sentier se transforme en chemin recouvert de graviers, puis du bitume ! Enfin je retrouve mon élément naturel ! Plus que 2Km à parcourir, 12 minutes environ avant la délivrance. Je suis sorti de l'enfer.

Les regards avec les autres concurents dans le petit peloton avec lequel je traverse Pechbonnieu sont plein d'humilité. Personne ne pense à doubler pour "gratter" une place à la mesquine. L'important n'est pas là. Nous avons déjà gagné le plus important en sortant debout de cette forêt. D'ailleurs, à la vue de la raideur de nos foulés, je comprends qu'aucun d'entre nous ne serait capable d'accèlérer sous peine d'un sévère rappel à l'ordre par les crampes.

Alors nous profitons des derniers mètres de souffrance avant de reprendre une vie normale. Je passe sous l'arche après 2h23'26" d'un effort dont je n'avais pas soupçonné l'intensité. Très proche de celle d'un Marathon. Un exercice diamétralement opposé. Si le Marathon est la Formule 1 du Running, le Trail est son Paris Dakar. Une épreuve ou l'adaptation à toute les situations est primordiale. Je n'ai quasiment pas regardé ma montre GPS (et j'ai d'ailleurs oublié de l'éteindre à l'arrivée et j'ai arrêté le chrono presque 1 minute après la ligne); seulement pour voir combien de Km il me restait à parcourir.

Après avoir trouvé un peu de confort dans des vêtements secs, je suis retourné chercher ma bière et m’empiffrer de pain d'épice.

Bref, je suis devenu un trailer...et j'ai adoré ça ;-)


Merci à : @NolwenNFuyons qui m'a appris tout ce que je sais sur cette discipline (il faut boire de la bière à la fin et ne pas se raser), @LaCaveAJaife pour "Comment tenir un verre de bière", @Lasourisbeaute pour le point météo très précis que j'attends toujours et à vous tous mes pioupious pour vos encouragements et messages après la course 😘

2 commentaires:

  1. J'adore! ça y est t'es traileur! Oui la bière c'est bien mais ça rajoute ce piment "est ce que j'ai toujours mon coupon?" à n'importe quel moment pendant la course! :D
    Félicitations, tu t'es pas épargné pour un premier!

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